L’inbox zéro, ou comment ne plus se laisser déborder par ses emails
Avertissement : Je suis du genre à avoir des palpitations lorsque j’aperçois au bas d’un écran la pastille rouge indiquant 2459 emails non lus. Si vous aussi cette situation vous empêcherait de dormir, alors cet article est pour vous. Si au contraire vous pensez que l’inbox zéro relève d’un comportement à la limite de l’obsessionnel, il vaut mieux passer votre chemin. Sans rancune.
L’inbox zéro, c’est en quelque sorte le minimalisme appliqué à l’email. L’objectif consiste à vider systématiquement sa boîte de réception lorsque l’on consulte ses courriels. Si le principe paraît simple, la réalisation peut s’avérer plus ou moins complexe en fonction du volume de mails reçus chaque jour.

Le concept est loin d’être révolutionnaire. Il avait en effet déjà été identifié par Merlin Mann lors d’un Google Tech Talk en 2007, pour être ensuite repris par d’innombrables articles de blog et livres de productivité.
Pour ma part, cela fait quelques années que je suis une adepte de l’inbox zéro. Cette pratique, en association avec une simplification toujours plus grande des processus, permet de gérer ses emails d’une manière rapide et efficace. Elle réduit aussi très nettement ma sensation d’être submergée par les tâches à accomplir.
Je vous partage dans ce billet la méthode et les différentes astuces que j’ai développées au fil des années pour garder le contrôle de ma boîte de réception.
Les principes de base de la gestion des emails
Avant de rentrer dans le détail, je souhaite passer en revue deux principes de base qui me semblent être les fondamentaux d’une gestion efficace des emails.
1. Désactiver les notifications et limiter la fréquence de consultation
C’est la base de la base. Et c’est d’ailleurs valable pour toutes les applications, et particulièrement pour les réseaux sociaux.
On sait depuis longtemps que l’efficacité du multitâche est un mythe et la fragmentation du temps de travail contre-productive. Il faut en effet de longues minutes au cerveau pour retrouver sa concentration après une interruption. Même si on tente de faire abstraction de la notification pour rester focalisé.e sur la tâche en cours, le mal est fait. Le simple fait de savoir qu’il y a un email non lu dans la boîte de réception est en effet susceptible de diminuer les capacités cognitives, en plus d’augmenter le niveau de cortisol, l’hormone du stress. Le design de la bulle de notification, en rouge vif, est d’ailleurs conçu pour induire un sentiment d’urgence.

Se ménager des plages de travail ininterrompues est donc beaucoup plus intéressant que d’essayer d’être sur tous les fronts en même temps. De ce point de vue, la méthode Pomodoro peut être utile pour acquérir de bons réflexes.
Lire aussi : La méthode Pomodoro pour gagner en productivité
Dans certains métiers, la consultation des emails en continu est probablement une composante essentielle qui ne peut être évitée. Mais dans les autres cas, on peut se demander à quelle fréquence on doit réellement consulter ses emails. Deux ou trois fois par jour seraient probablement largement suffisantes. En dehors de cela, la tentation d’ouvrir sa boîte mail n’est qu’une forme de procrastination. Une simple tentative du cerveau de recevoir une gratification instantanée (et donc sa dose de dopamine), plutôt que s’adonner à une tâche plus difficile, mais aussi plus satisfaisante sur le long terme.
Outre l’impact sur la concentration, le traitement des courriels au fil de l’eau prend plus de temps que si on en traite un grand nombre d’un coup. C’est le principe du batch-tasking, le fait de grouper des tâches similaires en un seul créneau de temps. J’ai constaté aussi que lorsque je consulte mes mails sans nécessairement être dans les dispositions pour y répondre (par exemple sur mon smartphone), je finis par faire le travail deux fois. Les mails non traités restent dans la tête, ou alors j’oublie carrément d’y répondre car ils se perdent dans la masse.
L’idéal selon moi est donc de se réserver des créneaux spécifiques sur la journée pour consulter ET traiter ses courriels. Le reste du temps, le logiciel est éteint et les notifications désactivées.
2. Réduire à la source
C’est un principe dont j’ai déjà parlé à propos de la gestion des papiers, mais il peut parfaitement s’appliquer à la gestion des emails.
La première étape est de se désabonner systématiquement des newsletters qu’on ne lit jamais. On peut soit le faire au fur et à mesure ou bien utiliser un outil comme Cleanfox qui s’en chargera automatiquement. En bonus, éviter l’envoi inutile de newsletters permet d’alléger l’empreinte carbone de sa boîte mail. Les ours polaires vous disent merci.

Si on souhaite parcourir de temps en temps des newsletters ou les discussions provenant de listes de diffusion, sans nécessairement que celles-ci encombrent la boîte de réception au quotidien, on peut également utiliser les filtres. Certains clients email comme Gmail filtrent d’ailleurs les newsletters de manière automatique. Mais si on souhaite opérer un filtrage plus ciblé, on peut aussi le faire manuellement. Il suffit alors de définir une règle qui enverra directement les courriels correspondant à certains critères vers un dossier dédié. Ceux-ci n’encombreront plus la boîte de réception, mais on aura toujours la possibilité de les consulter à loisir.
Pour aller plus loin :
Filtrer des messages avec Gmail | Outlook | Apple Mail
Comment je pratique l’inbox zéro
Au fil du temps, en plus de viser l’inbox zéro, j’ai de plus en plus simplifié ma gestion des emails. Lorsqu’un mail entre dans ma boîte de réception, il a donc trois destinations possibles :
- La corbeille
- L’archivage
- L’envoi vers une application tierce, puis la corbeille ou l’archivage.
Et c’est tout.
Plus concrètement, détaillons ensemble trois cas de figure différents.
Cas de figure n° 1 : aucune action n’est requise
Après avoir pris connaissance du mail, je l’archive (si je pense en avoir éventuellement besoin dans le futur) ou je l’efface.
Je dois dire que plus le temps passe, moins j’ai de scrupules à envoyer directement des mails dans la corbeille.
Cas de figure n° 2 : une action est requise immédiatement
Je réponds à ce type de mails dans la foulée, puis j’archive.
Évidemment, ceci n’est possible que dans le cas où je suis dans les conditions nécessaires pour le faire. Impossible par exemple d’écrire une réponse détaillée sur smartphone. D’où l’importance de considérer le traitement des emails comme une tâche à part entière, et pas comme une distraction…
Cas de figure n° 3 : une action est requise en différé
C’est dans ce cas de figure que j’expédie le mail dans une application tierce, pour le dégager de ma boîte de réception.
Si c’est une tâche à réaliser plus tard, par exemple une facture, j’envoie le mail dans Todoist avec une date d’échéance. Je pourrais la payer directement, mais ça me distrairait de la tâche en cours, qui est le traitement des emails. Et comme je l’ai expliqué dans cet article, je préfère traiter mes factures et l’administratif en une seule fois.
Si c’est une invitation à un événement, je l’envoie dans mon agenda électronique. Je prends soin d’y ajouter dans la foulée toutes les informations utiles (localisation, notes éventuelles), pour ne pas devoir retourner au mail plus tard.
Si je souhaite garder le contenu du mail comme documentation à consulter à l’avenir, je l’envoie dans Evernote. S’il contient des liens vers des articles que je veux lire plus tard, je les envoie dans Pocket.
Lire aussi : Papier vs digital : mon workflow
Une fois que c’est fait, j’archive le mail ou je l’efface.
En plus de désencombrer la boîte de réception, l’intérêt de cette méthode, c’est aussi de devoir le moins possible retourner dans le logiciel email pendant les plages de travail. J’évite ainsi le risque de me laisser distraire par les nouveaux emails qui arrivent dans la boîte de réception. Vous l’aurez compris, je ne suis donc pas très fan de l’utilisation du logiciel mail comme système de gestion de tâches.

C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles j’utilise le client email Spark (disponible pour l’instant uniquement sur Mac, iOS et Android) qui communique de manière très intuitive avec les applications tierces que j’utilise fréquemment. Mais ces principes peuvent être facilement appliqués avec n’importe quel autre système. Il suffira alors de transférer le mail vers une adresse email générée par l’application. Celle-ci peut être enregistrée dans les contacts pour pouvoir être facilement retrouvée.
Le classement par dossiers : la fausse bonne idée ?
Il fut une époque où j’avais élaboré une arborescence très détaillée pour le classement de mes emails. Jusqu’à ce que je me rende à l’évidence : il est beaucoup plus simple et rapide de retrouver un mail via la fonction « recherche ». Les classer dans chaque dossier individuel était donc une pure perte de temps.
S’il vous semble néanmoins indispensable d’opter pour un classement par dossiers, je conseillerais de le garder le plus simple possible et d’éviter l’arborescence à plusieurs niveaux. On pourra par exemple consacrer un seul dossier par projet.
Un dossier « en attente » peut également s’avérer utile, si on souhaite garder un œil sur une correspondance qui nécessite un suivi. Toutefois, il existe une méthode bien plus efficace que je détaille ci-dessous.
La fonction « boomerang » pour automatiser le suivi des mails
Boomerang est une extension qui peut s’ajouter à Gmail ou Outlook. Les fonctions qu’elle propose sont aussi parfois présentes de manière native dans un client email (c’est le cas de Spark que j’utilise). Trois d’entre elles nous intéressent plus particulièrement ici :
- Reporter la réception d’un mail, pour qu’il revienne à un moment plus opportun. Cette fonction peut être une alternative à l’envoi dans une application de gestion des tâches.
- Planifier l’envoi d’un mail à un moment ultérieur. Cette fonction est utile dans deux cas de figure. 1. On traite ses mails à des heures inhabituelles, mais on ne souhaite pas importuner ses collègues (qui n’auraient pas désactivé leurs notifications) en dehors de leurs heures de travail. C’est aussi une manière de respecter le droit à la déconnexion. 2. On souhaite qu’un mail arrive à une heure précise, par exemple lorsqu’on sait que son correspondant ou sa correspondante sera davantage disponible pour y répondre. Ainsi on se libère l’esprit en s’acquittant immédiatement de la tâche, tout en optimisant le moment de réception du message.
- Activer le suivi d’un mail. Si on souhaite s’assurer de ne pas perdre de vue le suivi d’un dossier, on peut définir un rappel lors de l’envoi d’un mail. On obtient ainsi une alerte si le mail n’a pas reçu de réponse du destinataire dans le temps imparti.

Bonnes pratiques et autres astuces
Pour aller un peu plus loin que l’inbox zéro, je vous propose en vrac quelques astuces supplémentaires et bonnes pratiques.
1. « Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse ».
Désencombrer sa boîte de réception, ça signifie aussi prendre garde de ne pas encombrer celle des autres.
Il est donc utile de se demander en premier lieu si l’envoi du mail est vraiment nécessaire. Et fuir comme la peste la fonction « répondre à tous ». Par ailleurs, rester concis dans la rédaction et aller droit au but amélioreront les chances que le message soit lu et entendu.
Pour aller plus loin : Les conseils du blog de Volna Productivity Studio sur la manière de rédiger des mails efficaces.
2. Supprimer l’application mail de son smartphone.
Et la réinstaller par exemple en cas de déplacement pro de longue durée. Pour être totalement transparente, j’avoue que je suis un peu ici en mode « fais ce que je dis, pas ce que je fais ». J’ai en effet fini par réinstaller l’application mail sur mon téléphone après ma dernière détox digitale. Toutefois, elle me sert uniquement lorsque j’ai besoin de retrouver un mail en déplacement, ce qui arrive rarement, mais tout de même. L’application est « cachée » dans un dossier sur un écran secondaire, et j’ai perdu l’habitude de la consulter en vitesse en transit.
3. Automatiser les emails fréquemment envoyés
Si on doit fréquemment rédiger le même type d’email, on peut préparer des modèles à personnaliser pour gagner du temps.
Pour aller plus loin : créer des modèles sur Outlook | Gmail
4. Envoyer un mail avec Gmail sans passer par la boîte de réception
Si on utilise Gmail dans un navigateur, on peut accéder directement à la fenêtre « nouveau message » sans passer par la boîte de réception. On peut donc s’acquitter de l’envoi d’un message sans se laisser distraire par les nouveaux messages entrants.
Il s’agit d’une astuce proposée par Matt D’Avela dans une vidéo sur le minimalisme digital. Il suffit d’ajouter ce lien aux favoris du navigateur et le tour est joué.
Une autre solution disponible pour certains clients emails est de désactiver la synchronisation automatique de la boîte de réception. Les emails sont réceptionnés uniquement à des moments définis au préalable, ou lors d’une synchronisation manuelle. C’est notamment l’une des fonctions proposées par Boomerang pour Outlook.
J’espère que cet article vous a donné des astuces utiles pour ne plus vous laisser déborder par vos emails. Pratiquez-vous l’inbox zéro ? Avez-vous d’autres conseils ? Partagez-les en commentaire !
2 Comments
Vanina
Je ne connais qu’une seule personne qui pratique le vrai « Inbox Zero », c’est mon assistante. A chaque fois que je vois sa boîte mail, c’est un ravissement absolu : elle est vide. Un mail n’y reste jamais plus d’une journée. Et son système de classement et d’archivage est non seulement ultra complet mais aussi et surtout très efficace. Elle retrouve tout en quelques secondes. Mon inbox à moi, c’est 25 665 mails à l’heure où j’écris ce commentaire. Autant dire que j’ai *un peu* de marge de manoeuvre !
Si je devais agir là dessus ce serait surtout dans une optique écologique car je sais le poids en CO2 d’un mail et de ce que cela génère comme impact environnemental. Ma vie professionnelle impose implicitement une connexion quasi permanente à ma boîte de réception mais aussi la nécessité de conserver un maximum de mails (preuves diverses, documents attachés, données ou références techniques intéressantes…). Toutefois, j’ai bien conscience que cette nécessité n’est rien d’autre que la conséquence (néfaste) de mon mauvais usage d’Outlook : pas de tri, pas de règles, pas de classement, pas d’archivage. En gros, un manque de discipline associé à des lacunes techniques. Si bien qu’avant d’utiliser des outils complémentaires pour optimiser le traitement de mon courrier numérique, il faudrait déjà maitriser l’outil principal. Or, l’expérience montre que je ne suis pas la seule dans ce cas et sans doute qu’il faudrait partir de la Base pour pouvoir être en mesure, par la suite, d’optimiser les à-côtés comme tu le fais (nota : j’admire !).
J’ai regardé tous les liens vers les utilitaires que tu proposes. je suis séduite par les options offertes par Boomerang, cela me semble plus efficace que les options de base dans Outlook, par exemple envoyer des mails en différé. Outlook permet de le faire, mais par contre, cela ne change pas la date d’envoi ! par exemple, je rédige un mail le dimanche, je le programme pour qu’il parte le lundi. Il arrive bien le lundi, mais daté du dimanche. Du coup, mon destinataire risque de le zapper. Et le rappel des mails restés sans réponse, c’est très bien aussi, je trouve. Maintenant, à voir si le service informatique veut bien me l’installer…
Les choses que j’ai mises en place (quand même !) pour ne pas (trop) me faire dévorer par mes mails pro : activer le petit drapeau rouge sur les mails que j’ai lus, que je n’ai pas traités mais dont je dois m’occuper rapidement. Ceux où il n’y a pas de drapeau, c’est que ce n’est pas important, ou que c’est juste un mail informatif. Bien sûr, il ne faut pas tout mettre en drapeau rouge, sinon ça ne sert à rien, mais justement, j’essaie de bien réfléchir avant de l’utiliser. Je double souvent d’une note dans mon agenda (manuscrite) lorsque le mail contient un échéance pour y répondre ou réaliser une action. Ainsi, je l’évacue de ma tête (à défaut de ma boîte) et y repense quand c’est nécessaire. Je fais aussi régulièrement le ménage dans les newsletters et mes mails supprimés. Enfin, j’essaye (j’essaye j’ai dit !) de trier dans des dossiers par thématique. Au moins.
Mon prochain objectif est donc de repasser en dessous de 20 000 mails !
(nombre de mails à la fin de ce commentaire : 25 670)
slowkairos
OMG, plus de 25000 mails ! J’ai cru faire une crise cardiaque ! 😀
Kudos à ton assistante du coup. À ta décharge, j’ai eu l’occasion d’utiliser Outlook pendant un peu plus d’un an et j’ai détesté. Ce n’est pas l’outil le plus intuitif qui existe en la matière. J’espère que tu pourras y associer Boomerang qui permet effectivement de simplifier pas mal de choses.
Concernant ton classement, j’ai envie de poser la question : est-ce que c’est vraiment nécessaire ? Parce qu’en quelques manipulations, tu pourras archiver simplement tous tes messages et arriver à l’inbox zéro. Tu pourras de toute manière les retrouver facilement par la suite avec la fonction recherche. Je trouve que parfois on a tendance à garder des anciens réflexes de classement qui ne sont pas toujours pertinents d’un point de vue digital.
Si tu souhaites tout de même garder un classement par dossier, les règles d’Outlook permettent de s’appliquer de manière rétroactive. Donc si tu établis une règle à partir d’un mail spécifique (via le menu clic droit), tu peux envoyer tous les mails qui correspondent aux mêmes critères dans le dossier de destination. Ça pourra t’éviter de les classer un par un.
Pour les newsletters, je trouve que Cleanfox marche bien, mais j’avoue que je ne sais pas si c’est une bonne idée de l’utiliser avec une adresse pro du point de vue de la confidentialité.
L’utilisation du drapeau rouge me semble un bon compromis dans ton cas, plus économique que le classement dans un dossier « à traiter » par exemple.
Merci pour ton retour en tout cas et courage pour dépasser la barre des 20.000 ! ^^